Gestion médicale d'une nécrose de l'hippocampe

Chat - femelle - 11 ans - 3,9 kg

Anamnèse

Chatte européenne stérilisée de 11 ans, diagnostiquée en 2013 avec une nécrose de l’hippocampe, responsable de crises convulsives. Depuis, la gestion des crises est satisfaisante grâce à une association de phénobarbital et de lévétiracetam. Elle a également présenté plusieurs épisodes de rétention urinaire résolus par des traitements médicaux. À l’heure actuelle, la chatte présente environ une crise convulsive tous les 3 mois. Le traitement actuel est de 2 comprimés de phénobarbital 10 mg le matin et 3 comprimés le soir (12,5 mg/kg/j) et 1 mL de lévétiracetam 100 mg/mL matin et soir (50 mg/kg/j).

Jour 1 : Examen clinique

  • Bon état général
  • Présente un prurit cervico-facial modéré et de l’acné au niveau du menton.

Examen complémentaire :

  • Urée : 0,49 g/L (normes < 0,78)
  • Créatinine : 7 mg/L (normes < 18)
  • PAL : < 50 UI/L (normes < 82)
  • ALAT : 50 UI/L (normes < 80)
  • Protéines totales : 77 g/L (normes 60-80)
  • Glucose : 0,85 g/L (normes 0,62-1,04)
  • Albumine : 27 g/L (normes 20-30)
  • Phénobarbitalémie : 67 µg/ml (normes 10-30)

Jour 2 : Traitement & Evolution

En raison de la phénobarbitalémie élevée, la dose de phénobarbital est réduite selon le plan suivant :

  • 2 comprimés de phénobarbital 10 mg matin et soir (10 mg/kg/j)Créatinine : 7 mg/L (normes < 18)
  • 1,5 mL de lévétiracetam 100 mg/mL matin et soir (75 mg/kg/j)

Évolution :

Une semaine après le changement de dosage, Roskoe présente une crise convulsive par jour.

Question 1

Nous avons voulu initier la diminution de la dose de phénobarbital en raison du taux qui nous paraissait trop haut sur la prise de sang, même si pour l'instant la biochimie ne révèle pas de désordre hépatique majeur. Mais il semblerait bien que le dosage actuel ne soit pas suffisant.

Que recommandez-vous ? Faut-il essayer d'attendre un peu ou augmenter encore la dose de levetiracetam ?

NEUROLOGIE

DV Nicolas Granger

Expert : Neurologie

Diplôme : European College of Veterinary Neurology (ECVN)

Bonjour,


Je crois qu’entre deux maux, je choisirais de remettre le phenobarbital tel qu’il était.


En effet, la chatte a probablement toléré cette dose pendant longtemps sans toxicité hépatique et avec une situation stable.


On ne sait pas pourquoi certains animaux développent la toxicité et d’autres ne la développent jamais. Certes il y a un petit risque de toxicité, mais la marge de sécurité avec le phénobarbital chez le chat semble être supérieure que chez le chien, qui de toute façon est grande.

Il sera toujours possible d’augmenter le levetiracetam par la suite.

Je ferais une mesure des acides biliaires (pré et post prandiaux) pour avoir un reflet de la fonction hépatique et un point de repère pour le futur.


Je proposerais une seconde mesure des ALT ALP et acides biliaires pré-prandiaux dans 3 / 4 semaines pour vérifier une éventuelle évolution.


Enfin, il est possible de mesurer le pheno sérique 4 heures après la prise du matin et juste avant la prise du soir, pour avoir une idée de la cinétique.


Amicalement,


Nicolas


https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34387120/

J Feline Med Surg
. 2022 Jun;24(6):530-538. doi: 10.1177/1098612X211037431. Epub 2021 Aug 13.
Evaluation of the effect of phenobarbital administration on the biochemistry profile, with a focus on serum liver values, in epileptic cats
Michelle Hermans 1, Marios Charalambous 1, Akos Pakozdy 2, Ursula Eisl-Glantschnigg 2, Jasmin Neßler 3, Sofie Ae Van Meervenne 4, Gonçalo Serrano 1, Ine Cornelis 1, Luc Van Ham 1, Dominique Paepe 1, Bart Jg Broeckx 5, Sofie Fm Bhatti 1

Jour 3 : Suivi

Les dosages des acides biliaires montrent des résultats normaux :

  • Acides biliaires à jeun : 3 µmol/L (< 10)
  • Acides biliaires post-prandiaux : 3 µmol/L (< 30)
  • PAL : < 50 UI/L (normes < 82)
  • ALAT : 76 UI/L (normes < 80)

Jour 3 : Gastro-entérite

Présente des signes de gastro-entérite aiguë avec vomissements et diarrhée. Aucun facteur déclenchant précis n’a été identifié.

Le traitement administré comprend du maropitant, de la scopolamine-métamizole et du sulfadimidine-triméthoprime.

  • Urée : 0,46 g/L
  • Créatinine : 5 mg/L
  • PAL : 76 UI/L
  • ALAT : 136 UI/L
  • Glucose : 0,83 g/L

Question 2

Est-ce que cette augmentation des ALAT, dans ce contexte de gastroentérite, peut-être retenu comme un signe de début d'intolérance au traitement anti épileptique ?

NEUROLOGIE

DV Nicolas Granger

Expert : Neurologie

Diplôme : European College of Veterinary Neurology (ECVN)

Bonjour,

L’augmentation des ALAT semble faible et probablement liée à la gastro-entérite plutôt qu’à une toxicité médicamenteuse. Les acides biliaires sont plus révélateurs de la fonction hépatique. Un suivi des valeurs hépatiques (PAL et ALAT) dans 3 semaines est recommandé.

La cause alimentaire semble être une bonne piste. 

Jour 5 : Suivi clinique

Le chat est alerte et présente une légère perte de poids (200 g), avec un appétit augmenté et quelques vomissements sporadiques. La fréquence des crises reste stable. 

Les traitements administrés sont : 

  • 2 comprimés de phénobarbitol 10 mg matin et soir (14 mg/kg/j)
  • 1 mL de lévétiracetam 100 mg/mL matin et soir (70 mg/kg/j)

 

Examen biochimique : 

  • ALAT : 206 UI/L (normes 12-133)
  • T4 totale : 54 mmol/L (élevée pour un chat senior)
  • Phénobarbitalémie : 63 µg/ml (normes 10-30)

Question 3

Le traitement de l’hyperthyroïdie peut-il interférer avec le statut neurologique du chat ?

MÉDECINE INTERNE | NEUROLOGIE

DV Nicolas Granger

Expert : Neurologie

Diplôme : European College of Veterinary Neurology (ECVN)

Bonjour,

Pas à ma connaissance en terme de traitement. L’hyperthyroïdie peut causer une hypertension, donc des troubles neurologiques et des crises convulsives. Mais si le chat va bien, je ne vois pas de liens avec l’hyperthyroïdie, d’autant puisque le diagnostic était posé avant les mesures de T4.

Les valeurs hépatiques sont stables, un peu plus élevé pour ALT. Je préfère à me baser sur les acides biliaires pour évaluer la fonction hépatique.

Je continuerais le traitement actuel et je vérifierais les valeurs hépatiques, acides biliaires pré-prandial et T4 dans 3 mois. Mais peut-être a voir avec les médecins. Le cas n’est ouvert qu’à la neuro.

Amicalement,

Nicolas

 

Vet J
. 2019 Feb:244:1-6. doi: 10.1016/j.tvjl.2018.11.009. Epub 2018 Nov 20.
Reactive seizures in cats: A retrospective study of 64 cases
M Kwiatkowska 1, S Hoppe 2, A Pomianowski 3, A Tipold 2
Affiliations Expand
PMID: 30825884 DOI: 10.1016/j.tvjl.2018.11.009
Abstract
Epileptic seizures are a common indication for neurological evaluation. This retrospective study reviewed 789 cats referred for epileptic seizure evaluation to the Department of Small Animal Medicine and Surgery of the University of Veterinary Medicine in Hannover, between 1998 and 2017. The aim of this study was to determine common causes for reactive seizures (RS) in cats. Reactive seizures were diagnosed in 62 (7.9%) of 789 feline patients. The most common cause of RS was presumptive or confirmed intoxication (n=34/62; 54.8%). Toxins included permethrin (n=5/62; 8.1%), fipronil (n=1/62; 1.6%), and pesticide (n=1/62; 1.6%). Other common causes were hepatic and renal encephalopathy (n=6/62; 9.7% each), hypertension (n=5/62; 8.1%), hyperthyroidism (n=3/62; 4.8%), hypoglycaemia (n=3/62; 4.8%), and hyperglycaemia (n=1/62; 1.6%). Most commonly, cats with RS presented with generalised tonic-clonic seizures (n=25/62; 40.3%). A single status epilepticus was observed in 9.7% (n=6/62) and 4.8% (n=3/62) presented only with cluster seizures. Focal seizures were the only presenting sign in 3.2% (n=2/62) of cases, however in 4.8% (n=3/62) they were accompanied by tonic-clonic seizures. The mean age of all cats presented for RS was 10.8 years. In the intoxication group, the mean age was 2.9 years. Intoxication (confirmed or presumptive) was the most common cause of RS identified. Clinicians should suspect intoxication when other causes of RS are excluded; when there are appropriate historical findings; when the cat is frequently unobserved by the owner; when symptomatic treatment leads to cessation of epileptic seizures; and when seizures do not recur after treatment has been discontinued.

Keywords: Cats; Intoxication; Reactive seizures.

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DV Lorris LECOT

DV Lorris Lecot

Expert : Médecine interne

Diplôme : Ancien résident de l’European College of Veterinary Internal Medicine (ECVIM-CA)

Bonjour,

Il a été démontré que le phénobarbital pouvait induire une baisse de la thyroxinémie chez le chien. Donc si un effet des traitements anti-épileptiques sur la fonction thyroïdienne est attendu, celui-ci n’est pas dans ce sens-là.

Si vous choisissez de traiter l’hyperthyroïdie avec un traitement anti-thyroïdien, ces molécules (methimazole, thiamazole, carbimazole) peuvent perdre en efficacité lorsqu’utilisées en parallèle du phénobarbital.

Confraternellement,

Lorris